Sur les réseaux sociaux, les vidéos “routine parfaite” connaissent un véritable engouement, surtout dans le milieu de la mode. Proposant une succession de gestes minutieusement chorégraphiés, elles exposent des matinées idéales, des soins du visage élaborés et des tenues impeccablement coordonnées. Ce phénomène, aussi tendance qu’envahissant, n’est cependant pas sans conséquences, notamment sur les adolescents.
L’illusion d’un quotidien sans défauts
En scrollant sur TikTok ou Instagram, il est facile de tomber dans le piège du rêve éveillé. Les créateurs de contenu mode mettent en scène leur routine matinale dans des environnements parfaits : l’appartement lumineux, la salle de bain scintillante, les draps repassés. Ce souci du détail donne à voir une réalité magnifiée, où rien ne déborde ni ne dépasse.
Pour un adolescent en quête de repères, ce genre de contenu peut susciter un sentiment d’inadéquation, voire un mal-être diffus. Il est important de rappeler que ces vidéos passent souvent par :
- Plusieurs heures de préparation
- Du montage vidéo avancé
- Une sélection minutieuse des prises pour ne garder que le meilleur
Au final, le spectateur ne voit qu’un condensé d’instants triés sur le volet, loin du quotidien ordinaire de la plupart des jeunes.
Pression sociale et quête de validation
Adopter à son tour une “routine parfaite” devient alors une injonction silencieuse, un nouveau standard à atteindre pour être accepté. Ce phénomène est renforcé par la culture du like et du partage : plus la vidéo paraît irréprochable, plus elle suscite de réactions positives.
Des études récentes montrent que :
- 65% des adolescents ressentent une certaine pression à conformer leur apparence à ce qu’ils voient en ligne
- 42% déclarent avoir déjà tenté de reproduire une routine mode “parfaite”, sans réussir à satisfaire leurs propres attentes
Le danger ? Penser que le bonheur et le bien-être passent nécessairement par l’adoption de gestes et looks normalisés, au détriment de la diversité et de l’originalité.
Frustration créative et perte d’identité
La mode, par essence, invite à jouer avec les codes et à s’amuser avec son apparence. Mais l’omniprésence de routines ultra-scriptées tend à uniformiser les goûts et les styles. Beaucoup d’adolescents finissent par se demander s’ils doivent vraiment aimer ce qu’ils portent ou si ce n’est qu’une volonté de ressembler aux influenceurs populaires.
Voici pourquoi cette tendance peut étouffer l’expression personnelle :
- Peur de l’échec ou du ridicule en cas d’écart avec la “norme” des réseaux
- Hésitation à tester de nouveaux styles propres, par crainte de ne pas correspondre aux standards viraux
- Appauvrissement des inspirations, car l’algorithme propose toujours des contenus similaires
Le plaisir de créer et d’expérimenter laisse parfois place à une simple reproduction, privée d’authenticité.
Vers une mode plus authentique et bienveillante ?
De plus en plus de voix s’élèvent pour rappeler l’importance de la spontanéité et de la diversité. Certains créateurs osent désormais publier des routines imparfaites, des “réels du matin ratés”, ou encore des comparaisons entre idéaux et réalités. Ces initiatives participent à libérer la parole et à dédramatiser la recherche de perfection.
Peut-être qu’au fond, la meilleure routine mode serait simplement celle qui nous ressemble, faite de nos coups de cœur, de nos erreurs… et de tout ce qui fait notre quotidien si unique et vivant. À l’heure où les réseaux redéfinissent les codes, oser cultiver sa singularité pourrait bien être la clef d’une mode plus joyeuse et inclusive. Qui sait jusqu’où la diversité authentique pourrait mener la prochaine génération ?